Marie Ochka, artiste feutrière, cultive entre les épines de la vie (et parfois de son jardin aussi) de la laine et des mots...

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mercredi 2 avril 2014

Je me souviens...

... de ces temps proches mais si lointains où j'imaginais que mes rêves pouvaient avoir une prise sur la réalité, je me souviens et je regarde mes mains.
Fin 2009, ce n'est pas si loin tu vois, j'ai connu la césure, puis le fracas, ce n'était pas la première fois, mais ce fut la pire.
J'ai abandonné bien des choses en bas, tout en bas de moi, dans ce gouffre aux vertiges de l'angoisse.
J'ai enterré l'idée du rêve, mettant des mois à scinder la chose :  l'imaginaire en bas, le réel en haut.
J'ai dressé une frontière, planté des barrières.
J'ai fermé à clef, posté un gardien à l'entrée.
Tout au fond de moi, j'ai ancré ma faculté à rêver, je la croyais morte alors, c'est ce que j'avais de plus vif en moi ! Je ne le savais même pas. Elle ne me quittera jamais... Je le sais, désormais et c'est un peu comme vivre avec une laideur cachée, j'en connais le prix à payer, j'en connais le poids, petite j'étais laide à me faire tirer les cheveux, puis mon enveloppe a changé le regard des autres pour ma surface aussi et j'ai compris l'importance des apparences et le si peu et le si rare attrait pour le fond, le tréfonds des êtres et même des choses.

Et puis est venue la laine, elle adoucit le cours de ma vie, peut-être change-t-elle aussi un peu le regard des autres sur la surface des choses que je crée, je ne sais.

J'avais en moi, depuis toujours, niché dans les tréfonds de mon âme, un monde imaginaire qui n'avait aucun écho, aucune prise sur le réel. Mes mains, pourtant, donnent corps parfois et rendent palpable une de ces choses qui ne pouvaient naitre que là-bas, tout au fond, dans ce pays sans lumière où l'on avance qu'à tâtons.
Je crée un no man's land, un trait d'union, une chose qui n'existe que sous mes doigts. Et lorsque je vois une de ces choses pour la première fois, je ne sais ce qu'un aveugle de naissance qui recouvrerait la vue ressentirait mais j'imagine que c'est un peu ce qui m'arrive presqu'à chaque fois qu'une pièce, qui revient de ce loin là, se révèle sous mes doigts, qu'elle acquiert cette consistance étrange et palpable. Avant, je me serais demandé comment, pour qui, pourquoi je crée, aujourd'hui je crée juste pour créer, pour donner corps à ce que j'ignore le plus souvent.
C'est un peu comme si, un soir de printemps, tu découvrais des morilles dans ton jardin alors qu'au grand jamais, tu n'aurais pu t'imaginer qu'il en pousserait là et pourtant...


Et il y avait bien là toute une fricassée :


Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai une chimère qui attend les ailes épinglées de venir lentement, si lentement au monde...

.... et les chimères qui font souvent si peur me semblent avoir pourtant la douceur des temps qu'il reste à inventer.

4 commentaires:

  1. Tu as toujours été une belle personne, et ça transparait dans tes créations <3

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    1. ou c'est toi qui a toujours eu le bon regard, va savoir ;)

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  2. "Je crée juste pour créer, pour donner corps à ce que j'ignore le plus souvent." Cela me fait penser à ce que dit Jean Cocteau : "Le rêve est la forme sous laquelle toute créature vivante possède le droit au génie, à ses imaginations bizarres, à ses magnifiques extravagances !" Lui aussi a du découvrir des morilles dans son jardin ! :-) Un bouquet de bons bisous pour accompagner la naissance de ta chimère ! ♥ ♥ ♥

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    1. Oh, merci pour les bisous et la citation... Je crois que c'est une éphélène, mâle, mais chut...

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